Le Spritzer (recette et ragots)

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Le Spritzer, j’avoue, j’en bois.

Longtemps j’ai cherché à ce que cela ne se sache pas. Vous savez que je viens de Bourgogne, et même plus précisément des environs de Chablis. Vous comprenez ainsi que mettre de l’eau pétillante dans du vin était pour moi déjà quelque chose d’impensable, et lorsque je découvris cette pratique, de sacrilège. Rien que d’y penser, j’avais peur d’être reniée par ma famille. Depuis deux bonnes années, je m’y suis pourtant mise, mais je jure que JAMAIS je ne le ferai avec du vin de Bourgogne. Si j’ai commencé à boire du Spritzer, c’est que très souvent, les endroits où je me rendais servaient du très mauvais vin blanc. Et pour accompagner mes amis à la bière (que je ne bois pas), je décidai ainsi un jour d’en finir avec le mauvais vin et de prendre un Spritzer (histoire de diluer le goût sans doute). J’avais ainsi trouvé mon pendant à la bière. Après tout, ça pétille, le taux d’alcool y est moins important que dans le vin, et il est aussi même souvent servi dans une chopine. Cela fait beaucoup de similarités avec la bière. Rapidement, je m’habituais ainsi à en commander, et à pénétrer la culture du Spritzer.

En Autriche, plutôt que de proposer d’aller prendre une bière, nombreux sont ceux qui proposent d’aller prendre un Spritzer. Plusieurs magazines ont une rubrique qui s’intitule « Un Spritzer avec… » et qui consiste en un entretien informel avec une personnalité. Inviter à prendre un Spritzer a une connotation beaucoup plus informelle que d’inviter à aller prendre un café. C’est plutôt l’invitation à refaire le monde. A Vienne, il a même a son ambassadeur, et ce n’est personne d’autre que son ancien maire, Michael Häupl, un grand amateur de Spritzer que le lobby de la boisson pétillante a su utiliser pour promouvoir la viticulture locale. Cela permit aussi au Spritzer de sortir un peu de son cliché de boisson pour les femmes.

Mais que désigne vraiment le mot Spritzer ? Le terme découle du verbe spritzen, qui signifie gicler, arroser, ou encore injecter, notamment pour une piqure. On est donc dans l’idée d’arroser du vin. Assez poétique, mais quand même un peu moins délicat que son cousin allemand, le Weinschorle. Si vous demandez en Allemagne, ne vous étonnez pas si on vous sourit, si on se moque de vous, ou si on ne vous comprend pas 😉 Mais si on pense à l’adjectif spritzig, qui veut dire pétillant, on est en plein dedans. On a bien une boisson qui pétille, et avec du vin ! Quand on parle de Spitzer, on pense automatiquement au vin blanc, mais pour être plus précis, il faudrait parler de Weißer Spritzer, puisqu’il y a aussi le Roter Spritzer, celui avec du vin rouge. Je n’ai encore jamais osé goûter ce dernier, mais qui sait, l’été va juste commencer. C’est en effet une des boissons incontournables de l’été en Autriche, grâce au fait qu’il soit désaltérant tout en étant alcoolisé. C’est aussi l’une des boissons phares des Heuriger, tables vigneronnes où on adore se rendre à la belle saison. Si on fait ça dans les règles, on y commande d’ailleurs un « Liter Liter », expression locale pour qualifier la commande d’un litre de vin blanc et d’un litre d’eau gazeuse, que l’on mélange ensuite à notre guise en servant les verres des convives.

Que des vignerons vendent directement leur vin pour le mélanger avec de l’eau me choque. Tout se travail de la vigne pour ça !? Toutefois, après de très nombreuses expériences, je dirais bien que cela permet d’écouler du vin qui ne serait pas si bon que cela nature. L’eau pétillante, comme parfois la crème de cassis (pour le kir par exemple 😉), devient un cache-misère. Il arrive même que l’eau gazeuse échoue à tromper le buveur tant le vin s’approche du vinaigre. Mais bon je ne m’attarde pas sur ce sujet, restons sur un bon kir. Son prix reste bien sûr assez bas. Il fait partie des boissons les moins chères de la carte. Souvent, il est même moins cher que les boissons non-alcoolisées. On en trouve même dans des bouteilles en plastique, comme des sodas !

Un mélange certes, mais dans quelles proportions ? Eh bien c’est très simple. On est dans le 50/50. Moitié vin moitié eau gazeuse. Il y a aussi le mélange un quart trois quarts, baptisé « Sommer-Spitzer » (Spitzer de l’été), où on a plus d’eau. Mais attention ! Il n’y a pas moins de vin. On utilise simplement de plus grands verres.

Le point le plus controversé du Spitzer reste cependant l’ordre dans lequel on verse les deux ingrédients dans le verre. Pour cela, il y a deux façons de faire, ou plutôt deux chapelles. Il y a ceux qui versent le vin en premier, et ceux qui versent l’eau pétillante en premier. Le débat n’a encore jamais été vraiment tranché. Après avoir tenté les deux en public, et à plusieurs reprises, je vous conseillerais la première chapelle, sauf si bien sûr vous aimez débattre pendant des heures. Une option qui permet par ailleurs de se faire de nouveaux amis, ou de nouveaux ennemis, et peut même permettre d’améliorer son allemand, ou son dialecte.

Vous pouvez retrouver un panel de boissons pétillantes à l’autrichienne dans cet autre article.

Retrouvez mes autres recettes en cliquant ICI !

L’abus d’alcool est dangereux pour la santé, consommez avec modération.

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