Pour ce 18e défi, je vous invite à vous rendre dans un coin peu touristique de Basse-Autriche, très lié à l’Histoire de France.
Pourquoi on y va ? Parce que c’est dans ce château que Madame Royale, la fille de Louis XVI et Marie-Antoinette, a passé les dernières années de sa vie, aux côté de son neveu Henri d’Artois, comte de Chambord et prétendant à la couronne de France en tant que petit-fils de Charles X. La plus jeune sœur de Napoléon, Caroline, y vécut également des années plus tôt. L’Histoire de France post-révolutionnaire est donc bien liée à ce château et à ce coin de Basse-Autriche situé à quelques kilomètres au sud de Wiener Neustadt.
Le défi : Vous rendre à Frohsdorf et vous prendre en photo devant le château. Vous avez jusqu’au 18 juin 2025 pour réaliser ce défi. Pour qu’il soit validé, envoyez votre photo à pomelilou[arobase]gmail[point]com, sur messenger ou sur Instagram (photos et vidéos ne seront pas partagées et ne seront vues que par moi). Si vous le souhaitez, vous pouvez aussi les publier sur l’événement Facebook dédié au défi afin d’en faire profiter plus de monde. Vous pouvez aussi mettre un message sur cet événement si vous cherchez du monde pour relever le défi avec vous.
Tous les participants au défi seront conviés à se retrouver autour d’un verre lors de la fête de la musique samedi 21 juin dans le 9e arrondissement de Vienne.
Le château de Frohsdorf
C’est un château imposant et très élégant qui nous attend dans ce hameau de la commune de Lanzenkirchen. Il fut restauré il y a peu et semble rutilant. On aimerait d’ailleurs pouvoir pousser sa porte, mais il ne se visite malheureusement pas. Il appartient désormais à l’homme d’affaires autrichien Christian Baha. Au début des années 2000, on pouvait le louer pour des vacances ou des fêtes, une vidéo promotionnelle en faisant la promotion sur YouTube nous permet d’en visiter l’intérieur. Très sympa !
Sur place, on ne voit ainsi que les façades extérieures de ce grand château s’étendant sur quatre ailes formant une grande cour intérieure. Le château fut construit en 1672 et sa façade principale fut remaniée au début du 18e sièlce. Elle arbore toujours le blason des Bourbon de France avec leurs trois fleurs de lys. Ces derniers marquèrent l’histoire des lieux puisque Madame Royale et le comte de Chambord y vivaient avec leur Cour et en suivant un protocole très proche de celui avait établi à Versailles. Il faut donc s’imaginer que d’autres familles nobles vivaient sur place et dans les environs, et qu’il y avait un personnel important pour s’occuper de ce beau monde. Le comte de Chambord fonda ainsi à Frohsdorf une école pour filles et une école pour garçons où l’enseignement était délivré en français. Il fit en outre réaliser des aménagements sur ses terres, en créant par exemple une digue le long de la Leitha pour faire face aux inondations récurrentes.
Il est intéressant de noter que Frohsdorf signifierait à l’origine « village des grenouilles ». La famille royale ne pouvait donc point s’installer ailleurs.
Le domaine sur lequel se trouvait le château comptait du début du 17e siècle à 1868 deux autres châteaux, celui de Katzelsdorf et celui d’Eichbüchl. Ces deux châteaux ne peuvent également pas êtres visités. Une partie de l’Histoire de l’Autriche s’est toutefois écrite dans le château d’Eichelbüchl, puisque Karl Renner y séjourna du 9 au 20 avril 1945. Séjour durant lequel il travailla à la fondation de la IIe République d’Autriche, dont il devint par ailleurs le président à l’âge de 74 ans jusqu’à sa mort en 1950.
Château de Katzelsdorf
Château de Eichlbüchl
Madame Royale et le comte de Chambord à Frohsdorf
C’est en raison de la Révolution française et des régimes qui la suivirent et ne furent pas en leur faveur que Madame Royale, fille aînée de Louis XVI et Marie-Antoinette, et seule survivante de leur descendance, ainsi que le comte de Chambord, prétendant à la Couronne de France, se retrouvèrent en exil à plusieurs reprises.
Madame Royale, née Marie-Thérèse de France, fut remise à l’Autriche lorsqu’elle fut libérée de la prison du Temple à Paris. Elle arriva ainsi dans la patrie de sa mère et de son auguste grand-mère Marie-Thérèse d’Autriche. Elle vécut ensuite dans d’autres pays et rentra en France lors de la Restauration, quand ses oncles Louis XVIII et Charles X restaurèrent la monarchie. Puis ce fut de nouveau l’exil. Avec sa famille, ils restèrent un temps à Gorizia dans l’empire autrichien, aujourd’hui en Italie. C’est là que Charles X mourut, ainsi que l’époux de Madame Royale, qui n’était autre que Louis-Antoine d’Artois, son cousin et prétendant au trône puisque fils de Charles X. Tous deux n’ont pas eu d’enfant. C’est donc avec Henri d’Artois, comte de Chambord, son neveu par son époux et son petit-cousin par son père, qui était désormais prétendant au trône, qu’elle partit s’installer en 1844 à Frohsdorf. Elle avait alors 65 ans et acheta le domaine au duc de Blacas. Il lui avait légué le domaine, mais elle avait refusé le leg et l’acheta à la famille du défunt. Le comte de Chambord avait quant à lui 24 ans. Elle était pour lui comme une seconde mère, ayant d’ailleurs énormément contribuer à son éducation pour faire de lui le futur souverain du royaume de France. C’est ainsi qu’à la mort de Madame Royale, le comte de Chambord fit transformer la chambre du château de Frohsdorf où elle donna son dernier souffle en chapelle. À la fin de sa vie, elle portait le titre de comtesse de Marnes. Le comte décéda lui aussi au château, en 1883. Tous deux sont enterrés au couvent de Kostanjevica aujourd’hui en Slovénie et alors dans l’empire autrichien. Le domaine de Frohsdorf revint à Jacques de Bourbon (Bourbon d’Espagne), et resta dans la famille jusqu’en 1941.
Bourbonenweg, le chemin sur les traces des Bourbon à Frohsdorf
En arrivant à Lanzenkirchen, on est surpris de voir un certain nombre de fleurs de lys, notamment sur le mobilier urbain. La commune souhaite en effet mettre en valeur le passage des Bourbon sur ses terres. Pour cela, on trouve sur place un parcours très tranquille d’environ 4,5 kilomètres qui est jalonné de panneaux informant sur ses augustes habitants en allemand et en français ! On peut commencer cette boucle à la gare de Lanzenkirchen ou à l’arrêt de bus de Frohsdorf (Ortsmitte), rebaptisé Bourbonen-Platz’l, où se trouve à chaque fois un grand panneau avec un plan du parcours et des dépliants. Le parcours n’est pas balisé, mais il est très simple à suivre. Il est presque impossible de se tromper.
La rencontre de Frohsdorf
Le château de Frohsdorf accueillit en 1873 une rencontre de grande importance. Le comte de Chambord avait convié Louis Philippe Albert d’Orléans, petit-fils du roi des Français Louis-Philippe, et également prétendant à la Couronne de France (orléaniste). L’idée était de s’entendre pour que les monarchistes ne soient plus divisés et pèsent davantage politiquement. Le comte de Chambord souhaitait rester le seul prétendant légitime à la Couronne de France, et n’ayant aucune descendance, qu’elle revienne ensuite aux Orléans. Les discussions ne menèrent à rien, mais la rencontre reste un événement important dans l’histoire des mouvements monarchistes du 19e siècle.
Caroline Bonaparte
Le château et le domaine de Frohsdorf avaient aussi eu auparavant pour hôte une autre personnalité de haut rang en exil, la plus jeune sœur de Napoléon, Caroline Bonaparte. Elle y vécut de 1817 à 1824. Caroline était reine de Naples, royaume convoité par l’Autriche. Son époux Joachim Murat est tué après avoir ordonné la guerre contre l’Autriche pour devenir roi d’Italie. C’est ainsi qu’elle se retrouva en exil et aussi prisonnière de l’Autriche. Après avoir vécu quelques mois dans le château de Hainburg, elle s’installe à Frohsdorf avec son deuxième époux, Francesco Macdonald, qui avait été la ministre de la guerre de son premier mari lors roi de Naples. Elle se fait alors appeler comtesse de Lipona, un nom créé de toutes pièces qui donne « Napoli » si on change l’ordre des syllabes (Naples en italien).
Comment se rendre à Frohsdorf depuis Vienne ?
En voiture, comptez à peine une heure de route.
En transports en commun, cela prend également à peine une heure depuis la gare Wien Hauptbahnhof. Il y a un changement à Wiener Neustadt pour prendre le train régional R92 jusqu’à Lanzenkirchen (train toutes les heures). Pour se rendre ensuite au château, comptez 20 minutes de marche. En semaine et le samedi, le bus de ville (Stadtbus) 10 fait le trajet de la gare de Wiener Neustadt à Frohsdorf Ortsmitte en 35 minutes toutes les heures. On arrive à deux pas du château. Horaires des trains et des bus. Je vous recommande de télécharger l’application Scotty pour avoir les informations en temps réel. Pensez enfin aux billets avantageux.
Que faire dans les environs ?
- Faire un tour dans Wiener Neustadt pour découvrir les vestiges de ses anciens remparts et son académie militaire fondée par Marie-Thérèse d’Autriche.
- Sur le chemin ou la ligne de train en route pour Vienne, on peut s’arrêter par exemple à Baden ou à Mödling.
- Si on aime le vélo, la véloroute des thermes (Thermenradweg), qui est une partie de l’EuroVelo 9, passe tout près du château. On compte 73 kilomètres depuis le Ring viennois jusqu’à Lanzenkirchen.