La vache à lunettes de Vienne

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Cette semaine, je vous propose une histoire animale ancrée dans les murs de Vienne. Connaissez-vous la fresque représentant une vache portant des lunettes et jouant au backgammon avec un loup ? Elle se situe en plein cœur de Vienne, au n°12 de la Bäckerstraße.

Notre première rencontre eut lieu un soir d’hiver. Il faisait nuit et je quittais un café très connu de la rue quand je tombai nez à nez avec cette vache. Son regard, mis en valeur par ses lunettes, me semblait très interrogateur. J’avais l’impression qu’elle voulait me faire la morale pour les quelques « derniers verres » que je venais de prendre. Ou peut-être me faisais-je moi-même la morale. En attendant, cette image resta pour moi un certain temps une image divertissante de fin de soirée. Je finis quand même par aller la voir de jour et par m’intéresser à son histoire, très énigmatique.

Cette peinture murale découverte lors de travaux en 1978 date de la fin du XVIIème siècle. Elle servait alors de repère dans une ville où les habitations n’étaient pas encore numérotées. On l’appelait la maison « allwo die Kuh am Brett spielt » (là où une vache joue sur un plateau). La partie de la fresque que l’on peut voir aujourd’hui montre une vache portant des lunettes jouant à l’ancêtre médiéval du backgammon avec un loup qui pourrait aussi être un renard. Une mouche est bien identifiable au niveau des yeux de la vache, qui est surmontée d’un message illisible en lettres gothiques. Au second plan, on voit le bas du corps d’un homme tenant dans sa main un balai.

Cette image est interprétée comme étant une satire des conflits religieux qui avaient alors cours à Vienne entre catholiques et protestants. La vache représenterait ainsi le catholicisme, avec à ses côtés l’esprit divin symbolisé par la mouche, et le loup (ou le renard) symboliserait quant à lui le protestantisme. Une image en effet assez distrayante pour des conflits qui n’avaient en partie rien à voir avec des pratiques religieuses.

La fresque a toutefois aussi une légende qui lui est associée. Il s’agit là encore d’un homme qui s’éprend d’une toute jeune fille et finit par l’épouser, mais grâce à son humour et non à sa bravoure (même s’il lui fallait quand même une bonne dose de courage). Je vous propose un résumé de cette histoire.

Nous sommes au temps du duc d’Autriche Rodolphe IV, au XIVème siècle (déjà un anachronisme 😉). Le propriétaire de cette maison est un proche du duc et s’appelle Hieronymus Kuh (littéralement Jérôme Vache). Il était magistrat et fort peu apprécié des habitants de Vienne. Il aimait jouer au trictrac (l’ancêtre du backgammon) avec son ami Hans Kagelwidt. Hans était une personne très singulière, un vrai trublion au physique des plus charmant, qui quant à lui était très apprécié des Viennois. Il était d’ailleurs lui assez très proche du duc d’Autriche. On le surnommait même « der lustige Rat des Herzogs » (le drôle de conseiller du duc). Tout le monde se sentait attiré par lui et par ses blagues. Ainsi, ses venues quotidiennes auprès de Hieronymus Kuh étaient scrutées de près. Elles étaient presque l’occasion d’un spectacle de rue. Si Hans venait quotidiennement rendre visite à son ami, ce n’était pas seulement pour jouer. C’est qu’il était surtout tombé sous le charme de la fille de ce dernier, la jeune et ravissante Trudchen (là on retombe bien dans une légende classique). Un jour, il décida de déclarer sa flamme à cette dernière en se donnant en spectacle avec les roses de son jardin. Il demanda ensuite sa main à Hieronymus, qui répond qu’il aimerait beaucoup qu’il devienne son gendre, mais qu’il n’avait pas envie de se séparer si tôt de sa fille, qu’il aimerait encore la garder un peu à la maison. Mais là coup de maître de Hans qui lui répondit qu’il pouvait aisément venir vivre sous son toit ! Tout semble arrangé, mais le père veut que sa fille consente au mariage (moins classique comme légende). Trudchen accepte et en est ravie mais elle impose que l’on organise une grande fête de fiançailles le dimanche pour laquelle une partie de la maison devrait être peinte afin de nommer cette bâtisse allant abriter deux foyers. C’est Hans qui a à charge de trouver le peintre. Ce dernier travaille quelques jours cachés derrière de grandes toiles afin que l’on ne voie pas l’image qui doit être révélée le dimanche. Le suspens est à son comble et le dimanche, la rue est pleine de curieux qui veulent voir cette fameuse peinture murale. Lorsqu’on la découvre, tout le monde se met à rire et à se répéter « die Kuh am Brett » (la vache au plateau de jeu). Un hommage certain de Hans à son futur beau-père et certainement l’un des cadeaux de fiançailles les plus originaux qui puissent exister. Trudchen en tout cas s’en amuse et c’est ainsi qu’ils vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours.

Voyez que cette fresque inspire beaucoup d’histoires et d’aventures ! A vous de trouver la vôtre ! 😉   

 

Jeu-concours

La question : Où a lieu le défi de l’été de Ca valse à Vienne ?

Si vous pensez avoir la réponse, écrivez-moi à pomelilou(arobase)gmail(point)com. 1 pass 2 jours pour le festival du rire de Vienne (le tout premier !!!) est à gagner. Il ira à la personne tirée au sort ce soir vers 21h (diffusion en live sur Facebook). 

Le festival du rire francophone de Vienne a lieu les 15 et 16 septembre prochains et s’annonce des plus sympathiques, avec Franjo, Christophe Alévêque, Pierre Thevenoux et Walid Azak.

 

Informations pratiques

Adresse : Bäckerstraße 12, 1010 Vienne

Source de la légende (magnifiquement écrit mais difficile à lire).

 

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